Séminaire 2022-2023

Séminaire du CREDO 2022-2023
"Actualité de la recherche en Océanie"

Un accès en visioconférence est également proposé mais la participation sur le site St Charles est à privilégier

 

Pour celles et ceux ne possédant par de carte AMU, merci de vous mettre en relation avec les organisateurs, a minima 48h avant la date du séminaire, afin d'effectuer les démarches pour vous permettre l'accès au campus

Co-organisateurs
Lorenzo Brutti, Marc Tabani

Jour et horaire
le vendredi, de 10h à 12h30

Pour plus d'informations et contact pour accès à la visioconférence ou au campus
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Lieu
Campus St Chrles, Université d'Aix-Marseille
3 Place Victor Hugo
13003 Marseille
Bâtiment 15 - Espace Yves Mathieu - 5ème étage
Maison Asie Pacifique - Salle 15-511
Plan du campus en PDF

Si vous souhaitez consulter le programme des années précédentes, cliquez sur ce lien

Le programme du séminaire est actualisé tout au long de l'année

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Vendredi 14 octobre 2022

Francesca BRUNETTI
(Master 2 à l’Université de Rome « Sapienza » en Disciplines Ethno anthropologiques, Rome - Italie)

Art et transformation sociale en Polynésie Française

La Polynésie Française est un pays investi par des imaginaires stéréotypés, anciens et contemporains, qui ont contribué à la cristallisation d'un positionnement précis des acteurs sociaux au sein de la collectivité.
Dans ce contexte, j'ai particulièrement analysé les imaginaires (et leurs effets) qui ont été construits autour du corps féminin sur lequel la peur de l'altérité a d'abord été projetée et sur lequel, par conséquent, son contrôle a été agi.
Les imaginaires construits autour d'une société sont, en effet, des moyens qui peuvent conduire à l'incorporation d'une pensée qui complexifie la possibilité de transformation collective et de mobilité sociale. L'imaginaire immobile est établi dans un temps cyclique qui se reproduit toujours dans une action dépourvue de pensée créatrice et de construction de la nouveauté. La construction des imaginaires peut donc être analysée comme un outil gouvernemental utile aux organes de pouvoir pour maintenir un équilibre solide (politique, économique et religieux).
J'analyse ensuite les deux mythes qui ont été sculptés sur le corps féminin (mythe de la vahiné tahitienne et mythe du matriarcat) afin de comprendre leurs origines et leurs conséquences sur le corps social. Cette analyse jette une lumière plus claire sur les conflits contemporains, en particulier sur la relation homme-femme et les dynamiques de pouvoir qui y sont liées.
Grâce à la rencontre avec des femmes artistes polynésiennes contemporaines travaillant sur le territoire de Tahiti, j'ai pu prendre connaissance d'une nouvelle manière d'analyser et de critiquer les imaginaires qui conduit à une réécriture actuelle de la collectivité ma'ohi. Les espaces créatifs se positionnent ainsi comme des lieux où il est possible de se réinscrire dans le temps historique, dans le mouvement et dans la transformation. Ma présentation vit à montrer comment, à travers la déconstruction des imaginaires mythiques et la production d'art indigène, il y a une possibilité d'autoréflexion et de résolution des conflits sociaux.

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Vendredi 18 novembre 2022

Fraser MacDonald

“A Thousand Eruptions: The Rise of Charismatic Christianity in Melanesia 1970-1980”

ABSTRACT : The decade 1970-1980 saw immense and vital transformations to the religious landscape in Melanesia. Seemingly without warning, countless intense charismatic Christian movements or 'revivals' exploded across the region, enveloping and gripping the minds and bodies of their participants and ushering in an era of truly indigenous worship. This talk explores the reasons why these movements erupted across Melanesia at this particular historical juncture, what kind of work they functioned to perform, as well as how they went about accomplishing this task. Drawing heavily upon the rich conceptual repertoire of Deleuze and Guattari, my approach is to treat these movements as assemblages that substantiate or 'effectuate' a set of abstract forces demanding the rapid expression of metaphysical security, an impulse that has motivated other cognate movements throughout Melanesian colonial history. As assemblages, the movements are also fundamentally concerned with the construction of ontological platforms or 'territories', which they do so, firstly, by establishing stability in the face of looming existential chaos and, secondly, through the decomposition of extant worlds.

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Vendredi 25 novembre 2022

Andrea ZUPPI
Phd Université d’Aarhus (Danemark). Affiliée au laboratoire EREA dans le cadre d’un post-doc à la Fondation Fyssen (2021-2022)


Les missionnaires cannibales.
Une histoire amérindienne d’opulence et de tombée en disgrâce

Il n’y a pas si longtemps encore, les missionnaires cannibales vivaient toujours parmi les Kulina (Madiha) du Rio Purus, au Pérou. C’est ce que soutiennent certains des Kulina que j’ai rencontrées lors de mes séjours de terrain. Mais qui sont les missionnaires cannibales ? D’où venaient-ils et pourquoi étaient-ils venus ? Quel type de relation entretenaient-ils avec les Kulina ? Pourquoi sont-ils partis ? Cette communication vise à répondre à ces questions à partir de trois récits : un mythe de création kulina et deux versions de l’histoire des missionnaires cannibales, l’une par un Kulina et l’autre par un anthropologue. L’analyse croisée de ces trois récits permettra d’éclairer certains aspects de la socialité kulina comme le rapport à certaines figures d’altérité et les relations de maîtrise, la conversion au christianisme ainsi que la manière de se rapporter au passé.


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Vendredi 09 décembre 2022

Mark COLLINS

« Pourquoi tous ces oiseaux ? »
Premières pistes de recherche au retour d’une enquête ethnographique sur les relations interspécifiques marines sur l’île de Lavongai (PNG).

Cette communication proposera une présentation préliminaire des données produites lors de deux enquêtes de terrain réalisées en 2019 (3 mois), puis 2021-2022 (9 mois) sur l’île de Lavongai, en Papouasie-Nouvelle-Guinée. L’ethnographie en question porte principalement sur les relations entre les habitants de l’île et les êtres vivants du milieu marin.

Je commencerai par évoquer la langue vernaculaire, le tungag, puis je décrirai brièvement les pratiques locales liées au cycle de vie, le système de parenté, la tenure foncière, ainsi que l’organisation clanique et lignagère de la société. Ces éléments du contexte ethnologique permettront de mieux appréhender la thématique des relations interspécifiques marines. À ce sujet, j’évoquerai les savoirs ethnobiologiques des Lavongai concernant les espèces aquatiques, je présenterai quelques éléments de la classification vernaculaire de ces êtres, ainsi que les techniques de pêche, notamment les méthodes de capture et diverses formes de rituels propitiatoires, utilisés à l’endroit des poissons et des poulpes. Le rôle que jouent, dans ces rituels, certaines espèces d’oiseaux vivant en mer et sur le littoral sera ainsi mis en évidence. En reliant cette observation au fait que les Lavongai associent chacun de leurs 12 clans matrilinéaires à un oiseau, il s’agira donc de renouveler la question : « why all these birds? », que formulait Radcliffe-Brown dès 1951 dans « The Comparative Method in Social Anthropology » (p. 17). Plus précisément : quelle importance les Lavongai accordent-ils à ces oiseaux ? Comment pensent-ils leur relation aux oiseaux, notamment ceux auxquels sont associés les clans ? Quel rôle les oiseaux jouent-ils dans leurs interactions avec les animaux aquatiques ?

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Vendredi 16 décembre 2022

Marta GENTILUCCI
(post-doctorante en anthropologie à CUFR de Mayotte au sein du projet FUTURE MAORE REEFS)

Le chemin Kanak du nickel.
Souveraineté environnemental en Nouvelle Caledonie

Quels nouveaux scénarios se présentent lorsque les Kanak, un peuple "indigène" longtemps opprimé et marginalisé par l'impérialisme économique français, gèrent les revenus de l'une des plus importantes usines de traitement du nickel au monde ? Comment évoluent les représentations locales du nickel ? L'entrée des Kanaks (par le biais de la société minière SMSP) dans la chaîne du nickel correspond-elle à l'incorporation de cette société mélanésienne dans les dynamiques néolibérales et capitalistes, ou signale-t-elle l'émergence d'une voie kanak au capitalisme, ou encore y a-t-il des traces des deux processus ?

Les flux de nickel relient les îles, les peuples et les continents et contribuent au complexe tissage du monde dans lequel nous naviguons. Selon certains récits kanaks: le minerai "contient la terre et le sang de tous les ancêtres", "contient le combat pour l'indépendance", "est une partie de nous qui voyage pour partager", "est notre participation à la construction du monde moderne”.

Dans ce séminaire, mon objectif sera de mettre en évidence les relations, les connexions, les significations et les émotions liées au nickel, une ressource qui n'est pas simplement économique mais intimement liée à l'histoire politique, sociale et économique de cet archipel océanique.

En adoptant un regard orientée à saisir les (dé)connexions entre la gestion locale pratique des ressources naturelles et les échanges économiques mondiaux, je décrirai spécifiquement le tentative kanak de désactiver les mécanismes classiques de l'enclave minière. Ce cas ethnographique, issue d’un séjour de 10 mois entre 2017 et 2018 en Nouvelle Calédonie, nous fera en même temps réfléchir sur la façon dont le contrôle impérialiste des matières premières stratégiques peut être progressivement arrêté.

 

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Vendredi 6 janvier 2023

Nicola Manghi
(post doctorant à l'EHESS/CREDO et Research Associate à l'Université de Waikato)

Remettre l’État à sa place. Crise écologique et équilibre politique à Tuvalu

Composé entièrement d’atolls coralliens et d’îles volcaniques basses, le micro-état polynésien de Tuvalu risque d’être submergé par l’élévation du niveau de la mer due au réchauffement climatique. Une telle circonstance soulève des scénarios sans précédent : en devenant inhabitable, Tuvalu serait le premier État à perdre sa souveraineté en raison d’un dommage physique à son territoire. Cependant, la consistance politique de Tuvalu est mal décrite par les conceptions traditionnelles de la souveraineté, souvent eurocentriques et thalassophobes ; et les spéculations politiques sur l’avenir du pays, alors qu’ils le transforment en un échantillon de l’apocalypse climatique à petite échelle, risquent de négliger la spécificité de son histoire. Le regard anthropologique s’avère précieux à cet égard : en plongeant le défi contemporain de Tuvalu face au réchauffement climatique dans l’histoire longue de l’archipel et de sa construction politique, il permet de ralentir le scénario de l’état qui disparait et d’enrichir le regard concerné sur la souveraineté extérieure de Tuvalu avec un compte rendu des dynamiques qui garantissent la cohésion politique de l’archipel. A partir d’une manifestation qui, en 2019, a conduit au sabotage de l’aéroport de Funafuti, le séminaire portera sur la relation entre multiplicité et unité dans la politique tuvaluenne, en montrant comment certaines dynamiques historiques qui menèrent à la construction de l’État tuvaluen se trouvent reproduites, au niveau synchronique, dans son architecture institutionnelle.

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Vendredi 20 janvier 2023

François-Xavier FAUCOUNAU
(Doctorat EHESS-CREDO)
 
Revisite historiographique : un « Schisme » catholique à Guadalcanal dans les années 1930

De mai 1933 à 1936, à Guadalcanal, aux Iles Salomon, des autochtones s’opposèrent à la mission catholique qui s’y était établie depuis plus de trente ans. Ils avaient de leur côté un prêtre italien nommé Rinaldo Pavese, arrivé aux Salomon en 1910.
 
Dans ce séminaire, je reviendrai sur cet événement de l’histoire des missions catholiques aux Salomon, inexploité depuis les travaux pionniers de l’historien du Pacifique, Hugh Laracy. Pourquoi les habitants de Guadalcanal, plus ou moins convertis au christianisme, se sont-ils insurgés avec Pavese contre la mission et en particulier son chef, l’évêque Raucaz ? Pourquoi Pavese a-t-il pris leur parti, ou, selon la perspective des missionnaires, pourquoi les « indigènes » l’ont-ils suivi dans sa révolte ? Pourquoi, enfin, le « schisme » a-t-il d’abord duré avant de prendre fin en 1936 ?
 
Cette présentation visera à répondre à ces questions et, ce faisant, à formuler une hypothèse de convergence culturelle entre missionnaires et Salomonais.

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Vendredi 27 janvier 2023

Séminaire inter-laboratoire d'anthropologie d'Aix-Marseille (le Silaam) auquel participe le CNE, le Credo, l'Idemec, l'Imaf, l'IrAsia et le LPED

« "(Im)matérialités" : objets, concepts et terrains en sciences sociales ».

Cette première journée est intitulée « Dématérialiser » et s’organise en deux sous-axes :
    – Le matin : (Im)matérialités environnementales : étudier le rapport de l’humain avec son milieu
    – L'après-midi : Mondes numériques, humanités numériques : la dématérialisation en question

Lieu : Salle Meltem, au Mucem à Marseille
De 10h à 17h

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Vendredi 03 mars 2023

Iris Portoleau
(Doctorante en 2ème année AMU)

Adapter les enseignements d’histoire-géographie en Polynésie française : les programmes et les matériaux pédagogiques de la période coloniale à nos joursAdapter les enseignements d’histoire-géographie en Polynésie française : les programmes et les matériaux pédagogiques de la période coloniale à nos jours

L’adaptation des enseignements n’a rien de nouveau en Polynésie française. Déjà prescrits par l’Etatdurant la période coloniale et permis par la distance à la métropole, les projets d’adaptations ont été abandonnés dans les années 1960, au moment de l’installation du Centre d’expérimentation du Pacifique et de l’arrivée massive de militaires au profit d’une école plus proche de celles de métropole pour assurer une continuité aux familles métropolitaines arrivant sur le territoire. La question des adaptations s’est posée à nouveau dans les années 1980, alors que la Polynésie française obtenait son statut d’autonomie interne (1984) et que des revendications identitaires se renforçaient dans les territoires du Pacifique et ailleurs dans le monde. La question scolaire a alors cristallisé de fortes tensions sociales et politiques, des tensions qui apparaissent encore aujourd’hui dans les discussions sur les programmes d’histoire-géographie comme au sujet de l’enseignement du fait nucléaire en Polynésie française. Aujourd’hui, la collectivité d’outre-mer a une certaine autonomie en matière d’éducation et a notamment en charge le second degré sans pour autant avoir la main sur les programmes qui sont actuellement « partagés » ni sur les examens qui restent nationaux, supposant un alignement stricte des programmes sur ceux de la métropole.

Que disent ces adaptations des relations entre la Polynésie française et la métropole ? Les programmes scolaires suivent-ils les évolutions statutaires du territoire ? Les enseignements sont-ils les mêmes dans tous les archipels ? 

Cette communication reviendra sur une enquête de terrain de 7 mois réalisée en 2022 à Tahiti puis aux Marquises, en Polynésie française. Elle portera sur l’histoire des adaptations des enseignements d’histoire-géographie et leurs applications en classe, de la période coloniale jusqu’à aujourd’hui.

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Vendredi 31 mars 2023

Séminaire inter-laboratoire d'anthropologie d'Aix-Marseille (le Silaam) auquel participe le CNE, le Credo, l'Idemec, l'Imaf, l'IrAsia et le LPED

« "(Im)matérialités" : objets, concepts et terrains en sciences sociales ».  Nous aborderons celui-ci suivant l'angle de la « rematérialisation » :« "(Im)matérialités" : objets, concepts et terrains en sciences sociales ».  Nous aborderons celui-ci suivant l'angle de la «   :• Sous-axe du matin :  Sous-axe de l’après-midi : Matérialiser l’immatériel dans la recherche : médiation et diffusion

Cette deuxième journée est intitulée « Rematérialisation » et s’organise en deux sous-axes :

  •  Le matin : Regards croisés sur les processus de collecte et de patrimonialisation
  • L'après-midi : Matérialiser l’immatériel dans la recherche : médiation et diffusion

Lieu : Salle Duby, à la Maison méditerranéenne des sciences de l'Homme (MMSH), 5 rue du Château de l'horloge à Aix-en-Provence.
De 9h15 à 17h

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Vendredi 07 avril 2023

Jacopo BARON
(University of Cambridge - L.A.S.)acopo BARON (University of Cambridge - L.A.S.)

Nouvelles trajectoires muséales pour les images Naluan du sud de Malakula (Vanuatu) : notes pour un projet d’exposition

L’exposition permanente du Musée du Quai Branly-Jacques Chirac présente des pièces remarquables provenant de la région sud de l’île de Malakula (Vanuatu). Beaucoup de ces pièces font partie de l’attirail cérémoniel du complexe rituel connu localement sous le nom de Naluan, Nalawan ou Naruan, et toutes datent de la fin du 19e siècle au milieu du 20e siècle. À cette époque, la Mission Presbytérienne s’est opposée au Naluan et l’a finalement interdit dans les régions sous son influence, avec un succès particulier dans le sud-est de l’île. Néanmoins, après un long processus de rétablissement rituel par les groupes indigènes, une cérémonie Naluan a été récemment organisée à Burbar, village côtier du sud-est de Malakula. Étant dans la région pour mon travail de terrain post-doctoral, j’ai pu assister au rituel et le documenter. Au cours de mon intervention, je présenterai brièvement l’histoire du Naluan et les informations recueillies sur le terrain. Ces données seront utilisées pour illustrer le concept d’une exposition temporaire qui pourra dialoguer efficacement avec la collection permanente du Musée du Quai Branly-Jacques Chirac tout en apportant un éclairage nouveau sur ce complexe rituel célèbre et pourtant peu connu.

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Vendredi 14 avril 2023
Giacomo NERICI
(Université de Milan-Bicocca)

Un archipel en mouvement : politique et poétique de la tradition à Henua 'Enana/ Fenua 'Enata (îles Marquises)

Cet intervention vise à mettre en évidence certains aspects et thèmes principaux de ma recherche ethnographique à Henua 'Enana/Fenua 'Enata, qui a cherché à encadrer le processus récent de construction d'une identité partagée entre les îles de l'archipel d'un point de vue tant politique que culturel. Sur une période totale de dix-huit mois (mars 2021 - août 2022) en Polynésie française, mes recherches se sont étendues sur environ un an sur les six îles des Marquises, bien que passant de plus longues périodes à Nuku Hiva, Ua Pou et Hiva Oa. Cherchant à étudier les connexions, les processus et les déclinaisons insulaires de certaines caractéristiques du scénario artistique et culturel, j'ai préféré retracer les connexions et suivre les biographies sur plusieurs îles plutôt que de me concentrer sur l'une d'entre elles ou sur une seule vallée. Dans le contexte du " réveil culturel " qui s'est manifesté à partir des années 1970 et 1980, une attention particulière sera portée ici à la corrélation entre la valorisation culturelle et artistique des traditions et la nécessité pour les Marquises d'émerger politiquement par rapport aux deux grands termes de référence/opposition : Tahiti et la France. D'une part, je mentionnerai qu'au fil du temps s'est structuré un dispositif "arcipe-logique", c'est-à-dire une "manière de se penser comme un ensemble d'îles" qui remet en cause l'hégémonie de Tahiti en cherchant à renforcer les liens avec la France. D'autre part, dans le cadre de l'archipel et sur la base de mes recherches ethnographiques, j'aborderai plus systématiquement le discours sur la tradition dans un certain nombre de domaines de renaissance : la langue, la sculpture, le tatouage et les danses, afin de montrer les dynamiques de continuité/discontinuité historique et les processus non linéaires de transmission, de réinvention et de spectacularisation. En outre, dans chacun de ces domaines, j'essaierai de confronter la rhétorique et les pratiques de certains sujets ou acteurs institutionnels et, en même temps, d'observer comment elles sont contestées, interprétées et resématisées par d'autres interlocuteurs à un niveau informel, vernaculaire et créatif. Ce double niveau apparaît également dans le discours concernant la candidature de certains ensembles de nature et de culture de l'archipel à l'UNESCO, dans lequel la conservation archéologique du patrimoine est contrée par d'autres visions locales visant à préserver, par exemple, les lieux traditionnels dans la forêt, et à les maintenir dans une sphère d'accès limitée. En fait, j'essaierai de mettre en évidence comment il existe des tendances de la part des protagonistes du renouveau et des politiciens locaux à institutionnaliser les pratiques et les discours en adoptant principalement des modèles métropolitains. En même temps, je montrerai comment ce niveau est remis en question par une série de demandes visant à innover la "tradition" canonisée au début du " réveil culturel ", en la repensant sur la base de nouvelles valeurs, styles de vie et modes de se connecter aux ancêtres (tupuna).

 

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Vendredi 19 mai 2023

SEANCE DU MATIN :
Stuart KIRSCH (Professor of Anthropology - University of Michigan)

Talanoa Dialogue at UN Climate Change Meetings : The Extraordinary Encompassment of a Scale-Climbing Pacific Speech Genre

Introduced to the UN by the Prime Minister of Fiji, the Pacific speech genre of talanoa has become a key frame for international discussion of climate change policy. Traditionally associated with kava drinking ceremonies, talanoa includes practices that temporarily mitigate differences in hierarchy and rank, which help to facilitate the formation of consensus, a process sometimes referred to as ‘ThePacific Way’. This capacity has also motivated its application to a wide range of social interactions and speech events, scaling up from local contexts and national debates to international arenas. This includes talanoa’s contribution to the facilitation of the Paris Climate Agreement by promoting cooperation and the exchange of ideas. The Talanoa Dialogue differs from other speech genres at the UN, including the process of reconciliation through which resolutions and declarations are formulated. Fiji used its leadership role at international climate change meetings to counter representations of Pacific Islanders as passive victims of climate change, including the threat from rising sea levels. The introduction of talanoa to these meetings can be understood as an ideological project of encompassment in which a regional speech genre became an international framework for addressing one of the most consequential challenges of our times, global climate change.

SEANCE DE L'APRES MIDI :
Matteo ARIA (Université La Sapienza - Rome)

L’oubli et la fin de l’oubli en Polynésie française.

Les fameux «immemoriaux» vantés par Segalen et peints par Gauguin retrouvent, après un long oubli, une mémoire culturelle dense et articulent autour d’elle des politiques identitaires complexes. La conférence présentera plusieurs recherches de terrain à Tahiti, Raiatea et Tahaa. Elle portera sur la réappropriation de certains lieux de mémoire - les marae - et de pratiques traditionnelles - le tatouage, la marche sur le feu -, et le rôle de quelques personnages capables de restituer une lien fort avec les ancêtres. La revalorisation du passé, mise en œuvre par ces passeurs culturels, se construit à travers la manipulation et la réinterprétation de toute la tradition des exotismes (positifs et négatifs) produits et soi-disant « inventés » au fil du temps. A partir de ces témoignages ethnographiques, je voudrais essayer de rendre compte des développements réalisés ces dernières années par les chercheurs italiens sur la Polynésie et la Mélanésie.

Textes de référence dans mon parcours :
Aria, M., 2007, Cercando nel vuoto. La memoria perduta e ritrovata in Polinesia francese, Pisa, Pacini.
Aria, M., Favole, A., 2011, “Passeurs culturels, patrimonialisation partagée, créativité culturelle en Océanie francophone”, in G. Ciarcia (a cura di) Passeurs de mémoire, miroirs de l'ethnologie, Paris, Karthala, pp. 213-237.
Aria, M., Favole, A., Paini, A. (a cura di), 2016, Nuovi fermenti dell’antropologia oceanistica italiana, Numero monografico de L’Uomo, n.2, Roma, Carocci.
Aria, M., 2014,“Dans la vallée des tapu et des taura. Histoire, Terre, ancêtres à Taaha (îles de la Société) ”, in F. Angleviel (a cura di), La Mélanésie. Actualités et Etudes, Paris, L’harmattan, pp.121 139.

 

 

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Vendredi 9 juin 2023
Nick EVANS

Sujet de la séance en attente de confirmation

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Lundi 12 juin 2023 
Matteo ARIA (Université La Sapienza - Rome)

La densité des choses, entre l’Océanie et l’Italie.

Entre le XIXe et le XXe siècle, un grand flux d’objets d’art et d’artisanat provenant de mondes lointains a circulé entre les pays coloniaux, les grands musées et les collections européennes et nord-américaines. Dans la période postcoloniale, ces biens ont été interprétés comme des emblèmes de la domination occidentale rapace et de sa violence épistémologique ; et les peuples autochtones ont souvent demandé leur restitution. Dans un scénario similaire, une sensibilité différente s’est également développée, représentée par la vision d’objets ambassadeurs des Kanak de Nouvelle-Calédonie et dont ce séminaire s’inspire. Cette perspective conçoit les objets du passé désormais conservés dans les musées occidentaux non seulement comme les témoins d’une histoire d'incompréhension et d’oppression, mais aussi comme les messagers d’autres récits. Plus que des signes non équivoques d’une appartenance identitaire à valoriser ou à revendiquer à travers des politiques de rapatriement, ils peuvent raconter des fragments de la rencontre brutale entre Européens et populations locales, mettant en lumière les échanges, les malentendus et les re-sémantisations constantes opérées deux deux côtés de la rencontre. L'intervention aborde des processus de densification similaires en faisant dialoguer des recherches ethnographiques et des références océaniennes avec les réflexions développées dans le cadre du débat italien sur le patrimoine, les musées et la culture matérielle. L’intervention questionne aussi les résultats d’une enquête menée sur la culture matérielle domestique de familles de plusieurs villes toscanes et traite du rapport entre les personnes et les choses, du rôle des objets dans la construction des relations de lignée et d’alliance, de leur conservation en tant que formes de mémoire culturelle. Enfin, l’intervention s’efforce de montrer les processus de « densification » qui investissent les objets ordinaires de la vie quotidienne, bien au-delà de la portée aliénante que leur attribuent les théories classiques de la consommation.

Les principaux textes de référence de mon parcours :
Paini, A., Aria, M., 2014, La densità delle cose. Oggetti ambasciatori tra Oceania ed Europa, Pisa Pacini.
Aria, M. Dei, F., “La famille et le monde des choses. Culture matérielle domestique dans la Toscane d'aujourd'hui”, Ethnologie Française, 162 (2), pp 265-275.
Aria, M.. Dei, F. ,"Se sentir chez soi": les sens et le sacré dans la culture matérielle domestique, Anthropologie et sociétés numéro thématique Habiter le monde. Matérialités, art et sensorialités, 44-2, dirigé par Véronique Dassié, Marie-Luce Gélard et David Howes, pp.

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Vendredi 16 juin 2023
Béatrice VOIROL (Museum der Kulturen - Basel)

Provenance research, (digital) repatriation and collaborations with source communities: current trade-offs between ethnographic museums and their “fields”.

Many Pacific communities are cut off from their cultural heritage that is preserved in European museums. Often, hardly any historical material evidence of culture is left. Museums have therefore the responsibility to create transparency regarding their collections and to provide access to them. Ultimately, only a mutual transfer of knowledge between museums and source communities guarantees that a collection can be understood in its many aspects. For about a decade now, Switzerland has been working up its "colonialism without colonies”. Consequently, a variety of decolonization processes are underway in Swiss museums that shall be presented in this colloquium. On the one hand, provenance research offers an approach: Contexts of injustice are being addressed. The creation of transparency can lead to the repatriation of human remains or culturally sensitive objects. On the other hand, dialogue and knowledge transfer have become crucial to museum work. Traditional knowledge of source communities is increasingly incorporated into the collection’s documentation. Accessibility of data is a huge topic and digitization plays a key role. The exchange with source communities and the collaborations that emerge as an outcome, are leading to new ways of dealing with colonial heritage. Local voices claim a different interpretative sovereignty and represent different attitudes. Hence, museums should be accessible and polyphonic spaces for all, fostering critical dialogue, allow participation, and provide transparency regarding their collections.